Je lis Terre des oublis, de Duong Thu Huong.
Au lieu de rester dans l’ombre et de nous donner l’impression que nous lisons un ouvrage rédigé en français, le traducteur s’empresse de casser l’illusion par des notes de bas de page.
Non seulement il nous rappelle que nous lisons une fiction, alors qu’entraînés par le récit nous pensions que nous étions dans la réalité, mais en outre, il souligne, avec ses gros sabots, que le texte n’est que la laborieuse transcription d’un écrit que nous serions incapables de lire dans sa forme originale.
Voici une illustration (un personnage s'est fait dévaliser par un policier dans un bordel avec la complicité du maquereau, alors qu'une entremetteuse avait essayé de le mettre en garde en lui proposant de déguster une seiche) :
« On dit couramment : noire comme de l’encre de seiche. Pour les amateurs de fleurs, cela signifie qu’on risque de casser la cheminée (1) ou de se faire agresser par les maquereaux (2). »
(1) Contracter une maladie vénérienne.
(2) Den signifie noir mais aussi malchanceux.
Quel est ce galimatias incompréhensible ?
Il faut traduire au lieu de reproduire littéralement des expressions qui n’ont aucun sens pour le lecteur francophone. En compensant l'indigence de la traduction par des notes, on ne fait qu'aggraver son cas. En particulier, la deuxième note, totalement énigmatique, incite le lecteur à se poser des questions sans fin au lieu de jouir de la lecture.
Par ses notes intempestives, le traducteur réduit à néant tout l’art de l’auteur, qui avait réussi à nous transporter dans un monde imaginaire.
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