En moins de 150 pages, Lynda
Mugglestone fait le tour de la lexicographie, qui est l’art d’établir des dictionnaires.
Dans le premier chapitre,
elle définit la fonction du dictionnaire. Celui-ci ne se borne pas à cerner le
sens des mots, mais indique aussi leur prononciation, leur origine, leur
étymologie, leur nature grammaticale, les variations qu’ils subissent (conjugaison,
pluriel, etc.), leur usage et leur registre. Ouvrage utilitaire, le
dictionnaire ne se lit pas, mais se consulte.
La définition revêt
différentes formes. L’auteur établit une distinction entre les définitions classiques,
elliptiques, destinées aux locuteurs natifs, et les définitions qui prennent la
forme de phrases complètes, destinées aux apprenants.
L’auteur aurait pu illustrer
la définition classique, par exemple en reprenant l’article de l’Oxford Concise Dictionary consacré au verbe expel : « 1 force or drive
out. 2 force (a pupil) to leave a school. » On remarque que la première
définition est peu explicite et que la seconde l’est davantage parce qu’elle a
recours à un cooccurrent (a pupil). En revanche, les définitions du Collins COBUILD Dictionary sont
concrètes : « 1 If someone is expelled from a school or organization,
they are officially told to leave because they have behaved badly. […]
» Pour comprendre les définitions de l’Oxford,
il faut déjà connaître le sens du mot.
Dans le deuxième chapitre, l’auteur
retrace l’histoire du dictionnaire, qui se présentait sous la forme de
tablettes d’argile à Sumer, 2000 ans avant notre ère. Le support devint ensuite
le manuscrit, l’ouvrage imprimé, le CD-Rom, le Web, l’application sur le
téléphone intelligent et, juste retour
des choses, la tablette… numérique.
L’auteur présente ensuite la démarche
prescriptive (« comment il faut s’exprimer ») et la démarche
descriptive (« comment l’on s’exprime »). La première est privilégiée
par l’Académie française, dont le premier dictionnaire est publié en 1694,
tandis que Samuel Johnson (1755) considère que si les académies publient des
versions successives de leurs dictionnaires, c’est parce que la langue évolue.
Johnson se fondait sur des textes et en
présentait des extraits à titre d’illustration. Pour leur part, les
lexicographes modernes utilisent des corpus de textes informatisés et ne sont
plus uniquement tributaires de lectures dont la nature ne reflète pas
nécessairement la langue prise dans sa totalité. Cependant, j’estime que, s’il
est commode de définir un terme en recourant à une liste d’exemples, la lecture
de textes divers, au cours de laquelle les mots surgissent de façon aléatoire,
oblige le lexicographe à remettre constamment son ouvrage sur le métier, alors
que l’utilisateur de corpus rédige son article une fois pour toutes.
Dans le troisième
chapitre, consacré aux techniques du lexicographe, l’auteur aborde la structure
des dictionnaires, l’influence des dictionnaires les uns sur les autres (qui
peut aller jusqu’au plagiat), la méthode de travail de Samuel Johnson, l’aide
offerte par les corpus.
Les chapitres 4 et
5 portent notamment sur l’autorité du dictionnaire et la validité des
définitions. Ces dernières évoluent avec les mœurs et les idées du temps.
Le dernier
chapitre envisage l’avenir. Le dictionnaire n’est plus toujours un livre et est
souvent offert gratuitement sur le Web. Dans ce cas, il peut être le fruit d’un
travail collectif d’auteurs qui ne sont pas lexicographes (Urban Dictionary, par exemple). Par ailleurs, des dictionnaires
sont inclus dans des logiciels de traitement de texte et des liseuses.
En effet, cela a du être très intéressant comme livre pour vous! Vous vous-êtes trouvé dans les techniques, la structure etc?
RépondreSupprimerCe livre ne met pas en évidence le caractère collectif de la plupart des dictionnaires. Cela présente des inconvénients, notamment un manque de cohérence. Voici comment le Petit Robert définit chien et chat :
RépondreSupprimerchien : Mammifère (carnivores; canidés) issu du loup, dont l'homme a domestiqué et sélectionné par hybridation de nombreuses races.
chat : Petit mammifère familier à poil doux, aux yeux oblongs et brillants, à oreilles triangulaires et griffes rétractiles, qui est un animal de compagnie.
Dans mon Dictionnaire de la santé et du médical, j'ai veillé à ce que les définitions de maladie, par exemple, suivent toutes un même schéma.